La vidéoprotection

18 novembre 2024

Le nombre de caméras filmant la voie publique a fortement augmenté ces dernières années à des fins de sécurité. Des textes spécifiques encadrent ces dispositifs. Quelles sont les règles ? Quels sont les droits des personnes filmées ?

Les dispositifs de vidéoprotection sont des caméras qui filment la voie publique (routes, places piétonnes et trottoirs) ou les lieux ouverts au public (piscine, cinéma, musée, magasin, restaurant, etc.).

Ces dispositifs fixes, dont le déploiement a commencé dans les années 90, ne recourent ni à de la captation sonore ni à une technologie innovante (algorithmes d’intelligence artificielle par exemple).

Ces caméras peuvent être installées pour prévenir des atteintes à la sécurité des personnes et des biens dans des lieux particulièrement exposés à des risques d’agression, de vol ou de trafic de stupéfiants, des actes de terrorisme, dans les conditions prévues par l’article L. 251-2 du code de la sécurité intérieure (CSI).

Ces dispositifs peuvent également permettre de :

  • constater des infractions aux règles de la circulation ;
  • prévenir et constater des infractions relatives à l'abandon d'ordures, de déchets, de matériaux ou d'autres objets ;
  • réguler les flux de transport ;
  • protéger des bâtiments et installations publics et leurs abords ;
  • assurer la sécurité d’installations utiles à la défense nationale ;
  • prévenir des risques naturels ou technologiques ;
  • faciliter le secours aux personnes ;
  • lutter contre les incendies ;
  • assurer la sécurité des installations accueillant du public dans les parcs d’attraction.

Qui peut filmer quoi ? 

Seules les autorités publiques (les mairies notamment) peuvent filmer la voie publique, en particulier pour la constatation des infractions aux règles de la circulation, la prévention des atteintes à la sécurité des personnes et des biens dans des lieux particulièrement exposés à des risques d'agression, de vol ou de trafic de stupéfiants ou la prévention d’actes de terrorisme.

Les entreprises et les établissements publics (notamment les lycées, hôpitaux, universités, musées, etc.) peuvent filmer les abords immédiats de leurs bâtiments et installations (la façade extérieure mais pas la rue en tant que telle) dans les lieux susceptibles d’être exposés à des actes de terrorisme.

Les autorités publiques et les personnes morales de droit privé (principalement les commerçants) peuvent filmer dans les établissements ouverts au public particulièrement exposés à des risques d'agression ou de vol ou susceptibles d'être exposés à des actes de terrorisme.

Les particuliers ne peuvent filmer que l’intérieur de leur propriété : ils ne peuvent pas filmer la voie publique, même pour assurer la sécurité de leur véhicule garé devant leur domicile.

Qu’est-ce qu’un lieu ouvert au public ?

  • les lieux dont l'accès est libre (halls administratifs comme le hall d’une mairie, etc.) ;
     
  • ainsi que les lieux dont l'accès est possible, même sous condition, dans la mesure où toute personne qui le souhaite peut remplir cette condition (par exemple, le paiement d'un droit d'entrée au cinéma, à une piscine ou un à musée).

Pour plus d’informations sur les lieux et établissements ouverts au public, consulter la circulaire du ministère de l’Intérieur dédiée.

Quelles garanties pour la protection de la vie privée ?

L’emplacement et l’orientation des caméras et la précision des images captées ont une incidence sur la vie privée des personnes.

Les caméras de vidéoprotection ne doivent pas permettre de visualiser l’intérieur des immeubles d’habitation ni, de façon spécifique, leurs entrées (article L. 251-3 du CSI).

La CNIL recommande de mettre en œuvre des procédés de masquage irréversible de ces zones.

Oui, on peut filmer la rue. Non, une caméra filmant la rue ne peut pas filmer les fenêtres d'un immeuble.

Qui peut consulter les images ?

Les images peuvent être visualisées, en direct ou non, par un ou plusieurs agents publics ou privés, leur permettant de réagir si un évènement se produit (articles L. 251-2 et R. 253-3 du CSI).

Seules les personnes autorisées par l’arrêté préfectoral peuvent procéder au visionnage des images enregistrées.

Pour plus d’informations, consulter la circulaire du ministère de l’Intérieur.

Dans le cadre du déport d’images (article L. 252-3 du CSI), les destinataires des images (par exemple, les agents des services de police municipale) ne peuvent accéder aux images prises par des systèmes de vidéoprotection que pour les seuls besoins de leur mission :

  • ils ne peuvent accéder qu’à des images d’un dispositif de vidéoprotection mis en œuvre sur le territoire de la commune ou de l’intercommunalité ;
     
  • et sur lequel ils exercent cette mission.

Les personnes filmées ont, elles-mêmes, un droit d'accès aux images sur lesquelles elles apparaissent, ainsi qu’un droit d’effacement et de rectification.

La mise en œuvre d’un système de vidéoprotection doit être sécurisé : le visionnage des images ne peut être effectué que par les personnes spécifiquement et individuellement habilitées (par exemple les agents du centre de supervision urbain d’une commune ou les agents de sécurité du commerce). Ces personnes doivent être formées et sensibilisées aux règles de mise en œuvre d’un système de vidéoprotection.

Le responsable d’un système de vidéoprotection doit tenir un registre mentionnant notamment les opérations de collecte, de modification, de consultation, de communication et d'effacement des données personnelles avec l'identifiant de l'auteur, la date, l'heure, le motif de l'opération et, si cela s’applique, les destinataires des données (article R. 253-5 du CSI). Ces informations sont conservées pendant une durée maximale de 3 ans.

Pendant combien de temps conserver les images ?

La durée de conservation des images doit correspondre à l’objectif pour lequel le système de vidéoprotection est installé. En règle générale, quelques jours suffisent pour effectuer des vérifications, par exemple à la suite d’un incident.

La durée jugée proportionnée, dans chaque cas, est précisée dans l’arrêté préfectoral d’autorisation et ne peut excéder un mois (article L.252-3 du CSI).

Quelle information doit être apportée aux personnes concernées ?

Les personnes filmées doivent être informées, au moyen d'affiches ou de panneaux affichés en permanence, de façon visible et compréhensible par tous.

En pratique, il est difficile de faire tenir toutes les mentions d’information prévues par la réglementation relative à la protection des données sur une affiche ou un panonceau. Afin que les panneaux affichés restent lisibles, ils doivent au moins comporter :  

  • un pictogramme représentant une caméra ;
  • l'identité du responsable du système ;
  • les finalités poursuivies par le traitement ;
  • les droits des personnes concernées (accès, rectification, effacement).

Si le premier niveau d’information ne comporte pas toutes les mentions, on doit pouvoir trouver dans un second niveau les informations suivantes :

  • la durée de conservation des images ;
  • le nom ou la qualité et le numéro de téléphone du responsable/du délégué à la protection des données (DPD/DPO) ;
  • la base légale du traitement ;
  • les destinataires des données personnelles, y compris ceux établis en dehors de l’Union européenne ;
  • enfin, s’il y en a, les informations complémentaires qui doivent être portées à l’attention de la personne (prise de décision automatisée, profilage, etc.).

Ces informations sont prévues par l’article 13 du RGPD et l’article 104 ou à l'article 116 de la loi Informatique et Libertés, selon que le dispositif s’inscrit dans les activités prévues par le RGPD ou par la directive « Police-Justice ».

Les recommandations de la CNIL

  • Publier le second niveau d’information sur une source numérique (par exemple un code QR ou une adresse de site web) mentionnée au premier niveau.
     
  • Publier ces informations sous une forme non numérique, par exemple sous la forme d’une fiche d’information complète disponible dans un lieu central (par exemple, au bureau d’information ou à la réception) ou d’une affiche.
     
  • Permettre au public d’accéder aux informations du deuxième niveau sans entrer dans la zone surveillée, en particulier si les informations sont fournies par voie numérique.

 

Information suffisante : "Ville placée sous vidéoprotection pour la sécurité des personnes et des biens. Les images sont conservées pendant un mois. Pour en savoir plus sur la gestion de vos données personnelles et vos droits, rendez-vous sur le site de la commune, rubrique "Protection des données". Pour exercer vos droits sur vos données (accès, rectification, effacement), vous pouvez écrire à dpd@ville.fr ou à l'adresse postale suivante : XXX."

Quelles formalités ?

Auprès de la préfecture du département

L’installation d’un système de vidéoprotection doit être autorisée par le préfet territorialement compétent (à Paris, le préfet de police), après avis d’une commission départementale présidée par un magistrat.

L’autorisation est valable 5 ans et est renouvelable.

Le formulaire peut être retiré auprès des services de la préfecture du département ou téléchargé sur le site web du ministère de l’Intérieur. Il peut également être rempli en ligne.

Auprès de la CNIL

Les autorités publiques, y compris les communes, doivent effectuer au préalable une déclaration de conformité au RU-074 (article R. 253-7 du CSI).

La déclaration se fait en ligne sur le site web de la CNIL à la rubrique « déclarer un fichier ».

Les autres organismes n’ont pas besoin d’informer la CNIL ou d’obtenir son autorisation pour un dispositif vidéoprotection.

Toutefois, lorsque la mise en œuvre d’un dispositif de vidéoprotection conduit à « la surveillance systématique à grande échelle d’une zone accessible au public », une analyse d’impact sur la protection des données (AIPD) doit être effectuée. Cette AIPD doit permettre d’évaluer la nécessité et de la proportionnalité du dispositif envisagé, au regard des finalités poursuivies.

Quels recours pour les personnes concernées ?

Si un dispositif de vidéoprotection ne respecte pas ces règles, toute personne peut adresser une plainte à la CNIL.

La CNIL est compétente pour s’assurer que les systèmes de vidéoprotection sont mis en œuvre conformément au cadre légal applicable.

Elle peut procéder à des contrôles, pouvant porter sur l’existence et la validité de l’autorisation préfectorale concernant le dispositif, le respect de sa finalité, les modalités d’information et de droit d’accès des personnes filmées, la qualité des personnels autorisés à visualiser les images, les mesures permettant d’assurer la sécurité du traitement (notamment la nécessité de tenir un registre des consultations) ou encore le respect de la durée de conservation autorisée des images.

Si elle constate des manquements, la CNIL peut adresser à l’organisme concerné une mise en demeure de prendre les mesures permettant au système de vidéoprotection d’être conforme aux règles de protection des données. En cas notamment de manquement grave ou persistant, ou d’organisme de mauvaise foi, la CNIL peut également décider d’adopter une des sanctions prévues par les textes (rappel à l’ordre, limitation temporaire ou définitive du traitement, sanction pécuniaire, etc.).