Les enquêtes administratives de sécurité
Afin de prévenir la réalisation d’attentats ou d’actes susceptibles de porter atteinte à la sûreté de l’État, certains organismes peuvent conduire des enquêtes administratives de sécurité en consultant plusieurs fichiers. Si vous postulez ou que vous travaillez dans un métier ou secteur sensible, vous pouvez être concerné(e).
À quoi sert l’enquête administrative ?
Les enquêtes administratives de sécurité concernent les personnes qui souhaitent travailler dans certains secteurs en rapport avec la sécurité ou la défense ou d’autres missions de l’État, exercer un métier considéré à risque ou qui suppose d’accéder à des zones ou des évènements sensibles.
Une telle enquête est réalisée pour s’assurer que le comportement ou les agissements d’une personne ne sont pas incompatibles avec l'exercice des fonctions ou missions envisagées, ou déjà occupées.
Qui peut être concerné par une enquête administrative ?
Les enquêtes administratives sont encadrées par la loi. Elles peuvent intervenir :
- dans le cadre d’une procédure de recrutement ou d’affectation à un poste, dans le secteur public ou privé, pour les emplois :
- qui relèvent de certaines missions de l’État (magistrats, policiers, etc.) ;
- dans le secteur de la sécurité ou de la défense (agents de sécurité, personnels aéroportuaires, etc.) ;
- au sein d’entreprises de transport public de personnes ou de marchandises dangereuses ;
- avant la délivrance d’une autorisation, d’un agrément ou d’une habilitation, notamment pour accéder à des zones protégées (sites sensibles) ou à des informations classifiées.
Dans ces deux cas, l’enquête peut être effectuée même si la personne est déjà en poste ou dispose déjà de l’habilitation nécessaire pour occuper son poste. Cette enquête de vérification a pour objectif de s’assurer que le comportement de la personne est toujours compatible avec l’exercice de la fonction pour laquelle elle a été recrutée ou à laquelle elle a été affectée, en particulier s’il existe des doutes sur cette compatibilité.
De telles enquêtes administratives peuvent aussi être menées en prévision de grands évènements, afin d’autoriser des personnes qui, dans le cadre d’activité professionnelle ou en tant que volontaires/bénévoles, devront accéder à un établissement ou une installation exposés à un risque de menace terroriste.
Jeux olympiques 2024 : de nombreuses enquêtes administratrives prévues
L’organisation de la Coupe du monde de rugby en septembre 2023 et des Jeux olympiques et paralympiques en 2024 vont conduire à l’intervention sur sites de nombreux prestataires de services et de volontaires ainsi qu'à un recrutement et à une mobilisation importants de policiers, gendarmes et agents de sécurité.
Dans ce contexte, de nombreuses enquêtes administratives sont prévues afin de renforcer les contrôles et de détecter d’éventuelles menaces à l’ordre public et la sûreté de l’État.
Qui peut réaliser des enquêtes ?
Divers services et administrations peuvent être impliqués dans la réalisation d’une enquête administrative.
Des enquêtes peuvent être menées par les services de police ou les unités de la gendarmerie nationale, mais aussi par des entités plus récemment créées, telles que le conseil national des activités privées de sécurité (CNAPS), le service national d’enquêtes administratives de sécurité (SNEAS), ou le commandement spécialisé pour la sécurité nucléaire (COSSeN).
Quelle est la procédure suivie ?
Les organismes habilités procèdent en premier lieu à la consultation de fichiers (voir ci-dessous). Il s’agit en effet d’un préalable nécessaire à tout accès à un emploi ou à la délivrance d’une autorisation spécifique, considérés sensibles.
Si la personne concernée n’est pas présente dans un fichier, l’enquête administrative s’arrête là dans la majeure partie des cas, et son résultat est communiqué à l’autorité qui en a fait la demande.
Si la personne concernée est présente dans un fichier, une enquête sera en principe confiée au service de police ou à l’unité de gendarmerie territorialement compétent. Outre la consultation de fichiers complémentaires, une enquête de voisinage, voire un entretien administratif avec la personne concernée pourront être opérés.
La présence de données dans l’un ou l’autre des fichiers est susceptible de conduire à l’émission d’un « avis défavorable » ou d’un « avis favorable avec réserve » transmis à l’autorité qui accorde l’habilitation ou l’agrément. Cet avis constitue alors souvent un frein dans le processus de recrutement de la personne, ou dans l’obtention de l’habilitation ou l’agrément indispensable pour exercer une fonction.
Quels fichiers peuvent être consultés ?
Lorsqu’ils sont chargés d’une enquête administrative de sécurité, les services compétents peuvent consulter un certain nombre de fichiers. Il s’agit principalement :
- du « traitement d’antécédents judiciaires » (TAJ) ;
- du « fichier des personnes recherchées » (FPR) ;
- du fichier des « enquêtes administratives liées à la sécurité publique » (EASP) ;
- des fichiers de « prévention des atteintes à la sécurité publique » (PASP) et de « gestion de l’information et prévention des atteintes à la sécurité publique » (GIPASP) ;
- du fichier de traitement des signalements pour la prévention de la radicalisation à caractère terroriste (FSPRT) ;
- du système d’information Schengen (SIS) ;
- du fichier des objets et véhicules signalés (FOVeS).
Le système ACCReD (automatisation de la consultation centralisée de renseignements et de données), créé en 2017, permet de consulter automatiquement et simultanément, via une interconnexion, tous les fichiers précédents. Il est utilisé par le service national des enquêtes administratives de sécurité (SNEAS).
En outre, selon les motifs de l’enquête administrative et les services en charge de l’enquête, d’autres fichiers, en particulier de services de renseignements, peuvent être consultés : par exemple, CRISTINA, géré par la direction générale de la sécurité intérieure (DGSI) du ministère de l’Intérieur, ou GESTEREXT, mis en œuvre par la direction du renseignement de la préfecture de police de Paris (DRPP).
Quels sont les recours en cas de décision défavorable ?
Si vous êtes concerné par une décision défavorable rendue dans le cadre d’une enquête administrative de sécurité (par exemple un refus ou une perte d’emploi ou d’habilitation), vous pouvez :
- faire un recours administratif auprès de l’auteur de la décision (recours gracieux) ;
- faire un recours contentieux devant le juge administratif dans les deux mois à compter de la notification de la décision ;
- exercer vos droits d’accès, de rectification ou d’effacement sur vos données personnelles enregistrées dans le fichier dont la consultation a conduit à la décision défavorable.
Pour approfondir
- Les refus d'embauche à un poste d’agent de sécurité à la suite d'une enquête administrative
- Exercer ses droits par l’intermédiaire de la CNIL
- TAJ : Traitement d’Antécédents Judiciaires
- FPR : Fichier des personnes recherchées
- Publication des décrets relatifs aux fichiers PASP, GIPASP et EASP : la CNIL précise sa mission d’accompagnement
Les textes de référence
- Articles L114-1 du code de la sécurité intérieure (enquêtes administratives) - Légifrance
- Article L234-1 du code de la sécurité intérieure (liste des enquêtes administratives) - Légifrance
- Article L221-11-1 du code de la sécurité intérieure (enquêtes administratives avant les grands évènements) - Légifrance
- Article L234-2 du code de la sécurité intérieure (agents habilités à conduire des enquêtes administratives) - Légifrance
- Article R40-29 du code de procédure pénale (conditions de consultation des fichiers dans les enquêtes administratives) - Légifrance
- Décret n° 2010-569 du 28 mai 2010 relatif au fichier des personnes recherchées - Légifrance
- Arrêté du 7 juillet 2017 portant autorisation d'un traitement automatisé de données à caractère personnel dénommé « Fichier des objets et des véhicules signalés » (FOVeS) - Légifrance
- Article R236-1 du code de la sécurité intérieure (enquêtes administratives liées à la sécurité publique ou EASP) - Légifrance
- Article R236-11 du code de la sécurité intérieure (prévention des atteintes à la sécurité publique ou PASP) - Légifrance
- Article R236-21 du code de la sécurité intérieure (gestion de l’information et prévention des atteintes à la sécurité publique) - Légifrance
- Articles R231-4 et suivants du code de la sécurité intérieure (système d’information Schengen) - Légifrance